Nous quittons Siem Reap après la visite des somptueux temples d’Angkor pour rejoindre la capitale du Cambodge : Phnom Penh.
Phnom Penh
Nous arrivons de nuit dans cette ville bourdonnante d’activité. Les sollicitations sont très nombreuses, il y a les taxis, les magasins, les enseignes lumineuses, le bruit, les milliers de voitures et de scooters. En quelques minutes, nous sommes saturés d’informations et la traversée des routes fait assez peur étant donné que les Cambodgiens ne respectent pas les feux de signalisation. Nous nous sauvons dans un petit quartier qui semble plus calme, manque de chance c’est très glauque. Nous demandons à plusieurs hôtels mais le prix très élevé des chambres et le fait qu’ils proposent des tarifs à l’heure nous dissuadent de nous arrêter ici. Nous repartons donc pour un autre quartier plus « backpacker » mais, là aussi, les tarifs exorbitants nous font frémir. Finalement, après 2h de marche dans les rues avec nos gros sacs sur le dos nous craquons et prenons une chambre dans l’un des hôtels visités (la 2ème plus chère du voyage).
Le lendemain, Pierre souhaitant se reposer après avoir pas mal sollicité son genou la veille, je pars seule en direction du musée mémorial de la prison S21. Cette visite me tenait à cœur car je voulais mieux comprendre les évènements liés à la dictature des khmers rouges. C’est une visite très instructive mais qui fait froid dans le dos. Ce régime a causé la mort d’un Cambodgien sur 4 en moins de 10 ans. Un véritable génocide qui est encore vif dans les cœurs et mémoires des habitant car il s’est achevé seulement en 1979 à la libération de la capitale (fin officielle du mouvement en 1999). Les conditions de détention dans cette prison secrète étaient terribles et sur les milliers de prisonniers incarcérés, il n’y a eu que 12 survivants reconnus. C’était plus une maison de la mort qu’une prison avec une administration de la torture. Les prisonniers étaient fichés et numérotés à leur arrivée et chaque étape de torture, d’aveux pré-rédigés, jusqu’à la mort faisait l’objet de rapports de la part des bourreaux. Des cours étaient même donnés pour apprendre les meilleures méthodes de torture. Quand il n’y a plus eu de place pour enterrer les morts, les khmers rouges se sont mis à chercher des charniers pour se débarrasser des corps. L’horreur et les crimes de ce régime font parties des pires moments de l’espèce humaine. Il est à noter que de nombreux gardiens de cette prison se sont retrouvés à un moment ou un autre détenu de cette même prison. Il est important de se rappeler que ce genre de régime n’est généralement pas très reconnaissant envers ses propres soldats qui finissent souvent accusés de trahison au même titre que ceux qu’ils ont eux-mêmes condamnés un peu plus tôt. Après cette visite très dure émotionnellement, il m’a fallu un petit bout de temps pour m’en remettre.
Nous quittons assez rapidement Phnom Penh et poursuivons notre route vers le sud en rejoignant Koh Kong dans le massif des Cardamomes. Le trajet en bus est assez difficile car le chauffeur nous fait pas mal de frayeurs en prenant les virages de montagnes beaucoup trop vite. Nous arrivons vivants mais en nous jurant de ne jamais reprendre cette compagnie de bus (Virak Buntham).
Le massif des Cardamomes
A Koh Kong nous profitons du deuxième jour pour faire un trek dans la jungle. Nous partons tôt le matin et rejoignons notre guide au port. Il nous embarque et nous commençons par sillonner la mangrove. Malgré le redondant problème des déchets plastiques gisant un peu partout, la mangrove semble assez riche et foisonnante et nous croisons de nombreux pêcheurs de crabes et de crevettes. Après 1h de bateau nous arrivons enfin au sentier du trek et attaquons la montée. Il fait très chaud ce qui ne rend pas la marche facile et après avoir croisé la route d’un serpent nous nous méfions un peu des branchages. Nous arrivons tout de même au sommet pour le (très) copieux repas de midi préparé par notre guide. Après s’être rafraîchis dans une cascade, c’est un plaisir de casser la croûte. La route du retour est un peu plus compliquée car il y a beaucoup de descente aux pentes très inclinées et le genou accidenté de Pierre n’est pas encore suffisamment flexible pour ce type d’exercice. Après de gros efforts nous arrivons enfin au bateau qui doit nous conduire au lieu de notre bivouac. Après discussion avec le guiden nous décidons d’échanger les 6h de trek du lendemain par la visite d’une ferme, nos blessures ne sont pas suffisamment remises pour tenter le diable.
Nous arrivons sur le lieu du bivouac qui consiste en une terrasse surélevée et couverte avec des hamacs suspendus. C’est dans ces hamacs que nous allons dormir. Nous partagerons cette nuit avec nos amies gallinacées perchées juste à côté de nous. Excepté la tendance des coqs locaux à chanter à n’importe quelle heure de la nuit, ce nouveau type d’hébergement fut somme toute assez confortable et mémorable.
Nous repartons donc sur les chemins pour visiter une ferme des environs. Ayant déjà visité pas mal de fermes en Asie, nous ne nous attendons pas à grand-chose et finalement nous tombons sur une assez grande entreprise tenue par un vieux monsieur assez sympathique. Il nous explique que c’est un ancien résistant de la période des khmers rouges et qu’après quelques années en tant que juge, professeur d’université et quelques autres métiers, il a décidé de s’installer en tant qu’agriculteur. Même si c’était assez difficile de croire la moitié de ce qu’il nous a raconté tant il semblait avoir tout vu tout vécu, il était très gentil et très content d’avoir des petits Français pour raconter ses histoires. Sa ferme était d’une belle taille pour la région avec une vingtaine d’hectares de fruitiers (durians, manguiers, bananiers, orangers principalement) et plutôt bien entretenue avec des installations d’irrigation modernes.
Nous quittons la ferme et notre nouvel ami et partageons un dernier repas avec notre guide avant de regagner Koh Kong en traversant la mangrove et les villages de pêcheurs.
Kampot & Kep
Après une dernière nuit en ville nous reprenons le bus en direction de Kampot pour se rapprocher petit à petit de la frontière vietnamienne. En arrivant, nous marchons pendant longtemps sous un soleil de plomb avant de trouver une chambre de libre dans une petite guesthouse. Nous arrivons 2 jours avant le nouvel an lunaire qui est une célébration très importante pour les Chinois et les Vietnamiens qui se déplacent en masse pour profiter des festivités. La situation est la même dans beaucoup de villes d’Asie à cette date et il est très difficile de trouver des hébergements, et encore plus au tarif normal.
Bien décidés à profiter des environs, nous partons en tuk-tuk pour aller visiter un lac mystérieux, une plantation de poivre et des salines. La route est chaotique et il faut bien se cramponner aux montants pour ne pas se cogner contre le plafond.
Nous arrivons au lac secret (c’est bien son nom). Le paysage est très joli et certains en profitent pour faire du kayak. Notre guide nous apprend que ce qui rend ce lac célèbre c’est surtout le fait que Pol Pot avait formellement interdit aux habitants d’approcher du lac pendant le régime des khmers rouges. Pendant longtemps, ce lac est donc resté un lieu de mystère que les locaux avaient peur d’approcher.
Nous continuons notre visite en arrivant dans une plantation de poivre. Le poivre de Kampot est réputé dans le monde car c’est une Indication Géographique Protégée, même s’il existe a beaucoup de contrefaçons. Cette exploitation tenue par un couple franco-belge est très intéressante à visiter même si elle est plutôt touristique. Nous commençons par une visite des plantations et apprenons que le poivre met 3 ans avant d’être récoltable. Il existe 2 variétés sur la plantation : le poivre en grain et le poivre long. Ces 2 variétés donnent de nombreux types de poivres suivant leur maturité à la récolte, leur qualité et leur préparation. A l’issue de la visite et de la dégustation, nous avons un petit coup de cœur pour le poivre frais à la fleur de sel qui est vraiment original.
Nous repartons pour nous rendre cette fois voir de près les marais salants qui sont aussi une spécificité de la région. Les producteurs sont même organisés en coopératives. C’est toujours spectaculaire de visiter des salines car le paysage aménagé est vraiment particulier avec ces grands bassins d’eau séchés au fur et à mesure pour ne garder que les cristaux de sel.
A l’issue de cette journée chargée en informations agronomiques et culturelles, nous rentrons en ville et nous rendons rapidement compte qu’il sera très difficile de rester ici la nuit suivante. En raison du nouvel an lunaire, tous les hôtels visités sont complets et ceux qui ne le sont pas proposent des tarifs aberrants (dans les 60$ la chambre contre 10$ en temps normal). Nous décidons de nous rendre dans la petite ville voisine du nom de Kep en nous disant que nous aurons surement plus de chance pour trouver une chambre. Ça ne s’est évidemment pas passé comme prévu puisque les seuls logements disponibles se sont révélés être 2 hamacs aux moustiquaires trouées. Au moins la nuit ne nous a pas coûté grand-chose… 1$ par hamac. La ville est petite, charmante mais il n’y a vraiment pas grand-chose à faire. Nous faisons donc les 2 activités proposées en ville à savoir une balade le long de la mer jusqu’à l’embarcadère et une visite du marché aux crabes (emblème de la ville).
Après ces moments de pur divertissement (c’était quand même sympa), nous décidons de faire nos visas pour le Vietnam et nous avons la surprise de constater que toute l’administration vietnamienne est fermée en raison du nouvel an. Dommage pour nous, cela signifie que nous allons devoir rester bloqués à la frontière le temps que le Viêt-Nam finisse les festivités et nous envoie enfin nos visas, soit 1 semaine… Nous avons tout de même la pilule amère même si ce genre d’imprévus arrive sur un aussi long voyage.
Au bout de 7 longues journées, nous repartons enfin sur la route avec nos visas en poche, en direction de la frontière et de nouvelles aventures au Viêt-Nam.
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